Bon anniversaire, nos pleurs les plus sincères…
Chaque fois qu’arrive la date commémorative d’un évènement tragique (tuerie, incendie mortel, etc.), on sent de plus en plus (avec raison selon moi) l’absurdité de parler d’un anniversaire. Ma suggestion est d’adopter le mot « commémoré ». Comme ça, on parlera de commémorations et non de festivités. Par exemple, le 35e commémoré de la tuerie de Polytechnique.
Robert N., Québec
Chaque fois qu’arrive la date commémorative d’un évènement tragique (tuerie, incendie mortel, etc.), on sent de plus en plus (avec raison selon moi) l’absurdité de parler d’un anniversaire. Ma suggestion est d’adopter le mot « commémoré ». Comme ça, on parlera de commémorations et non de festivités. Par exemple, le 35e commémoré de la tuerie de Polytechnique.
Robert N., Québec
Inutile de vous donner tout ce mal : en dépit de votre perception, le mot anniversaire n’est pas fautif ici.
Mais étant donné que, probablement comme la plupart des gens, vous employez le mot anniversaire dans un contexte le plus souvent heureux (un anniversaire de naissance, de mariage, de rencontre, d’embauche, de fondation…), vous en êtes venu à croire qu’il porte une connotation positive en tout temps.
Sauf que, lorsqu’on jette un coup d’œil dans les dictionnaires, on se rend compte qu’il n’en est rien : au départ, anniversaire est un mot tout à fait neutre, et il peut s’employer en référence à des moments heureux comme malheureux.
D’ailleurs, vous avez peut-être déjà entendu les locutions « messe anniversaire » et « service anniversaire » pour désigner une messe ou un service religieux commémorant le décès d’une personne — en fait, cet usage religieux a été le tout premier du mot anniversaire en français. Cette tradition est en perte de vitesse, mais reculez de quelques années et elle était encore très courante. Au même titre que les avis de décès, les services anniversaires étaient annoncés dans les médias, et ils le sont même encore dans certains qui ont maintenu cette tradition.
Voici la définition de l’adjectif anniversaire selon mon Petit Robert 2021 : « Qui ramène le souvenir d’un événement arrivé à pareil jour une ou plusieurs années auparavant. »
Comme vous voyez, aucune mention sur le caractère de l’événement en question.
Un autre indice aurait pu vous mettre la puce à l’oreille : si le mot anniversaire était toujours positif, pourquoi lui accolerait-on des adjectifs comme bon, heureux ou joyeux? Logiquement, ce seraient des pléonasmes.
Des anniversaires… sans présomption
Certes, les principaux dictionnaires reconnaissent que, lorsqu’il est employé comme nom, anniversaire désigne un jour anniversaire (donnant lieu généralement à une fête), ou alors le jour anniversaire de la naissance de quelqu’un.
Mais ce serait très présomptueux de ma part de vous dire qu’il faut absolument créer un autre mot à cause de cette prépondérance. On peut très bien s’en sortir en portant attention aux verbes employés ou à la tournure de la phrase.
Par exemple, quand il est question d’un événement malheureux, il conviendra d’utiliser des verbes plus neutres. Ou alors on précisera le caractère de l’anniversaire à l’aide d’un adjectif.
On soulignera cette année le 35e anniversaire de la tuerie de Polytechnique.
Cette année marquait le 10e anniversaire de l’incendie de L’Isle-Verte.
C’est un triste anniversaire aujourd’hui : cela fait deux ans que la guerre en Ukraine a commencé.
Même 50 ans après, elle ressent la même douleur à la date anniversaire du décès de son nouveau-né.
Et si vous éprouvez toujours ce malaise du mot anniversaire dans un contexte malheureux, il vous est toujours possible de tourner votre phrase autrement.
On commémorera en mai la fusillade de l’Assemblée nationale, survenue il y a 40 ans.
Trente ans après les événements, la commémoration du génocide rwandais ravive les douleurs.
Cette plaque a été installée pour le centenaire de cette tragédie.
Attention aux commémorations
Un verbe qu’il faut absolument éviter avec anniversaire, c’est commémorer. Parce qu’un anniversaire est déjà une commémoration. Ce n’est pas l’anniversaire qu’on commémore, mais l’événement qui s’est produit il y a une ou plusieurs années.
Avec sa longueur, anniversaire peut sembler être le résultat d’une d’une agglutination de racines latines. Mais non : il existait presque tel quel en latin, sous la forme anniversarius, « qui revient tous les ans ». Il a été formé dans cette langue à partir du mot annus (an, et je vous prierais de ne pas mal penser ici) et du participe passé du verbe vertere (revenir).
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